Mea Culpa #2
Quand on devient parent par adoption, de nos jours, on est conscient que la parentalité adoptive a quelque chose de particulier. En effet, on se prépare d'abord au fait que l'enfant que l'on aura ne sera pas l'enfant dont on a rêvé ... Vous allez me dire que ça, tout parent le sait, adoptif comme biologique... Je suis d'accord,mais quel parent biologique a eu affaire à une assistante sociale, à un psy qui lui a expliqué tout cela en long, en large et en travers... avant de se voir délivrer l'autorisation de faire un enfant ?
Je sais, c'est extrême, mais c'est juste pour expliquer que nous, parents adoptifs, nous sommes mis en garde à de multiples reprises sur les spécificités qui nous attendent, sur le fait que nous allons accueillir un enfant pour lequel la filiation n'est pas une évidence, qui ne sait probablement même pas ce qu'est une famille.... et que donc, il va nous falloir être très attentifs, attentionnés, avoir tel ou tel comportement, répondre de telle ou telle façon à une question, à une attente... Et, parce qu'on est si conscient de la particularité de notre façon de devenir parent, on se met à lire des tas de choses, d'ouvrages, de sites internet, à aller écouter des conférences sur la parentalité adoptive... Entendons-nous bien, j'adore ces moments, ces lectures, ces échanges, ces explications, ... Pourtant, il m'arrive de me demander si tout cela n'est pas trop ?
Je me suis encore posé la question cette semaine. En effet, en couchant ma puce, celle-ci a "fait le bébé", j'entends par là qu'elle s'est mise à faire semblant de babiller, de façon aussi niaise qu'inutile. Et ma réaction ne s'est pas faite attendre : "arrête, tu sais très bien que je n'aime pas du tout quand tu fais ça ! Ca ne sert à rien, c'est ridicule et ça m'agace". Puis, j'ai dit "bonne nuit", fais le câlin traditionnel, et je suis redescendue. Ensuite, pendant la soirée, et même le lendemain, je n'ai eu de cesse de me remémorer ce moment-là ... N'ai-je pas été trop dure ? Ma réaction n'a t'elle pas été trop vive ? Elle a besoin de redevenir parfois le bébé qu'elle n'a pas été vraiment ...
Et puis, j'ai repensé à un échange de mails récent avec une autre maman adoptive, qui parlait de son besoin d'avoir des moments rien qu'à elle le week-end, juste pour se détendre et se distraire, et à qui je répondais que j'avais quasiment mis entre parenthèse le temps que je m'accordais pour les loisirs créatifs en solo depuis l'arrivée de ma puce, ... à part certains après-midi où elle était encore à l'école et moi à la maison, depuis janvier de cette année seulement. De fait, j'ai continué à réfléchir, à penser à tout cela, ... et je me suis dit :
- il y a une différence importante entre le fait de vivre certains événements de la petite enfance à 9,5 ans (ne pas quitter Doudou, se nicher sur mes genoux, en demandant des câlins, demander de l'aide pour des choses qu'elle sait faire en totale autonomie...juste pour qu'on s'occupe d'elle), et le fait de "parler bébé", chose qui m'a toujours prodigieusement agacée. Donc, j'assume ma réponse de l'autre soir !
- nous devons certes accorder toute notre attention à notre enfant, lui consacrer la plus grande partie de notre temps libre pour lui faire comprendre ce qu'est la famille, pour se donner le temps de "faire famille", nous sommes d'accord... Mais cela doit-il obligatoirement signifier qu'on doit renoncer à ce qui nous permet de nous ressourcer ? Dois-je continuer à ne plus aller seule (une fois par an) dans un institut pour me relaxer au cours d'une séance spa - massage, juste parce que ma fille pleure parcce qu'elle accepte difficilement que je fasse un truc sans elle ? Finalement, je ne le pense pas ! Je lui expliquerai que j'ai beosin de ce moment rien qu'à moi, mais j'y retournerai seule ! Tout comme je pense que cette autre Maman a raison de s'accorder un moment à elle pour jouer à un truc qui n'est pas fait pour une jeune enfant ... Finalement, la frustration fait partie des apprentissages de la vie, non ? Ca commence à 2,5 ans ? Ca tombe bien, on est pile dans le délai d'arrivée de nos enfants... du coup, c'est leur façon de vivre la petite enfance qu'ils n'ont pas eue ...
De ce fait, en y réfléchissant bien, tant pis si parfois je suis une mauvaise mère, je continuerai à faire la différence entre la compréhension de ce que sont nos enfants, qui arrivent avec un bagage lourd, et ce que je suis en mesure d'accepter... Je continuerai donc à me corriger sur mes exigences en matière d'école ou de comportements, je resterai vigilante sur les tsunamis émotionnels que peuvent provoquer des événéments anodins pour nous, je continuerai à défendre et à expliquer, à l'école ou ailleurs, les spécificités de enfants adoptés, surtout arrivés grands, ... bref, je continuerai à lire, à intégrer les savoirs et les expériences de ce qui doit être fait en matière de parentalité adoptive, mais je resterai pour autant moi-même.
Non, je ne supporte pas les "gnangans" et les enfants qui font semblant d'être des bébés, et tant pis si ça n'est pas bien, je persisterai... Mea culpa !